À l’instar de la série israélienne Hatufim, dont elle est la transposition hollywoodienne, Homeland met en scène le retour au pays d’un soldat après de longues années passées entre les mains d’un groupe terroriste islamiste. À l’interminable guerre du Liban, qui servait de toile de fond à la fiction israélienne, s’est substituée la seconde intervention des forces américaines en Irak. En mai 2003, deux tireurs d’élite de l’armée américaine sont faits prisonniers par des troupes irakiennes, qui ont tôt fait de s’en débarrasser au profit d’un groupe satellite de la planète Al-Qaïda. Tous deux sont séquestrés et torturés par des hommes au service d’Abu Nazir, l’un des innombrables “ennemis publics n°1” que comptent les États-Unis dans la région. L’un de deux soldats, Tom Walker, est donné pour mort après avoir subi un traitement trop brutal. L’autre, le sergent Nicholas Brody, demeure entre les mains de ses geôliers pendant huit longues années.
Archives de catégorie : « Culture-pop » et droit international
Les aventures de Bernard et Bianca (Walt Disney, 1977) et le droit d’intervention humanitaire : et si les souris nous montraient la voie ? Une analyse d’Olivier Corten
De l’intervention des puissances occidentales dans l’Empire ottoman aux récentes opérations militaires en Yougoslavie, en Libye ou en Syrie contre l’ « Etat islamique », le dilemme opposant le respect de la souveraineté et la poursuite de valeurs morales supérieures n’a cessé de se répéter. On le sait, le débat juridique voit depuis longtemps s’affronter deux tendances contradictoires. D’une part, les tenants de l’unilatéralisme préfèrent laisser aux grandes démocraties occidentales la responsabilité d’agir pour faire respecter les droits de l’homme. D’autre part, les défenseurs du système multilatéral de sécurité collective s’en tiennent au strict respect de la Charte des Nations Unies, avec comme conséquence la nécessité de se fonder sur une décision du Conseil de sécurité pour pouvoir agir. Le débat puise ses racines dans les théories de la guerre juste, et porte plus spécialement sur la question suivante : quelle est l’autorité légitime pour décider du déclenchement d’une opération humanitaire ?
The Ghostwriter (Roman Polanski) : un thriller politique ou un film d’anticipation ? Une analyse d’Anne Lagerwall
Alors qu’il passe l’hiver sur une île située au large des côtes de la Nouvelle-Angleterre aux fins de s’entretenir avec son nègre fraîchement recruté pour rédiger ses mémoires, Adam Lang (Pierce Brosnan), l’ancien premier ministre britannique, se retrouve au coeur d’une tempête médiatique et judiciaire. La presse fait soudainement état d’une autorisation qu’il aurait accordée, lorsqu’il était en fonction, d’arrêter sur le territoire pakistanais quatre ressortissants britanniques suspectés d’appartenir à un réseau terroriste. Ils auraient ensuite été remis aux mains d’agents de la CIA et soumis à leurs interrogatoires musclés. Il n’en faut pas davantage pour que l’opinion publique se mobilise et réclame que l’ancien premier ministre réponde de ses actes devant la justice. C’est dans ce contexte tumultueux que la procureure de la Cour pénale internationale annonce alors publiquement qu’elle s’apprête à demander l’autorisation d’ouvrir une enquête au sujet d’Adam Lang pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Avec une telle intrigue, The Ghostwriter ne pouvait que susciter l’intérêt d’une juriste curieuse de ce que le cinéma raconte à propos du droit international. A l’analyse, le film s’avère particulièrement enrichissant et ce, pour trois raisons au moins.
« Hatufim » Une série israélienne de Gideon Raff (saisons 1 et 2) – Violence panoramique – Une analyse d’Antoine Buchet et d’Immi Tallgren
Au début des années nonante, trois soldats de l’armée israélienne sont enlevés au sud-Liban par un groupe paramilitaire désigné sous le nom des Enfants du Jihad. Ils restent détenus pendant dix-sept ans, principalement en territoire syrien. La série [1] débute dans un hôtel de Francfort au moment où aboutissent les négociations entre le gouvernement israélien et les émissaires des preneurs d’otages. Deux soldats, Nimrod Klein et Uri Zach, sont libérés. La dépouille mortelle du troisième, Amiel Ben-Horin, est restituée.
La canonnière du Yang-Tse et la notion d’Etat (Robert Wise, 1967) – Une analyse de Michel Tabbal
Adapté du bestseller de Richard Mc Kenna et réalisé en 1966 par Robert Wise, La Canonnière du Yang-Tse (titre original The Sand Pebbles) s’inscrit dans la lignée des grosses productions de films de guerre réalisées lors de cette même période (comme La Grande Evasion ou Le Pont de la Rivière Kwaï). Porté à l’écran par Steve McQueen au plus haut de sa gloire – son seul rôle qui lui a valu une nomination aux Oscars –, Richard Attenborough (ces deux derniers avaient partagé l’affiche de la Grande Evasion), Richard ‘Rambo’ Crenna et Candice Bergen, cette superproduction de trois heures connut un succès commercial important en salles. Outre ses qualités cinématographiques, le film est surtout connu pour son discours ouvertement antimilitariste et pour être un des premiers films à dénoncer – implicitement – la guerre du Vietnam et – explicitement – l’interventionnisme américain. Continuer la lecture
Penser la justice pénale internationale avec Hannah Arendt (Margarethe Von Trotta, 2013): Une analyse de Vincent Lefebve
Ainsi l’« affaire Arendt » – plutôt que l’« affaire Eichmann » – a-t-elle été portée à l’écran. L’un des événements cinématographiques marquants de l’année 2013 est en effet la sortie d’un film allemand, réalisé par Margarethe von Trotta, consacré à la vie de Hannah Arendt afin d’illustrer certaines dimensions de sa pensée. On savait depuis longtemps que la vie de la philosophe avait quelque chose de fascinant (et ce bien au-delà de la couverture du procès Eichmann et de ses suites ; pensons à sa liaison avec Martin Heidegger). Un élément cinématographique peut à présent être ajouté au dossier.
Les points de focalisation de la polémique suscitée par la publication, en 1963, d’Eichmann à Jérusalem peuvent être brièvement rappelés : premièrement, il était reproché à Arendt d’avoir mis en cause le rôle des « conseils juifs », c’est-à-dire des organes représentatifs juifs, durant les années d’extermination ; ensuite, sa façon d’aborder la personnalité d’Eichmann et sa « thèse » corrélative de la banalité du mal avaient été soumises à la critique.
Le journal de Bridget Jones (Sharon MacGuire, 2001) et Bridget Jones : l’âge de raison (Beeban Kidron, 2004) : Le droit international comme arme de séduction massive – Une analyse d’Agatha Verdebout
Lors du récent colloque organisé par cette maison sur les représentations du droit international au cinéma et dans les séries télévisées, un constat s’est imposé : si les films traitent de problématiques qui sont indéniablement liées au droit, ils abordent rarement ces problématiques juridiques de front. La question s’est dès lors posée de savoir si notre discipline était suffisamment glamour et sexy aux yeux du grand public pour mériter un traitement plus minutieux de la part de l’industrie cinématographique.
La réponse à cette question, j’ai choisi de la chercher dans les chick flicks – littéralement « films pour poulettes » – et, plus particulièrement, dans les adaptations cinématographiques des livres éponymes de Helen Fielding, Bridget Jones’s Diary et Bridget Jones : The Edge of Reason. Plus que le droit international en tant que tel, nous verrons qu’une variété spécifique d’internationalistes – le « droit-de-l’hommiste » – apparaît comme, indéniablement, sexy.
Du droit international dans Game of Thrones ? (David Benioff, D.B. Weiss ; 2011-2014) : À Westeros, rien de nouveau… – Une analyse de Valère Ndior
Il est des terres hostiles sur lesquelles le juriste en droit international rechigne à s’aventurer, de peur de s’y fourvoyer ou de n’y trouver aucun repère familier. Fort heureusement, Game of Thrones fait partie de ces fictions TV qui animent la réflexion et incitent à ébranler le Mur séparant la fiction du droit international. Surprenons-nous donc à rêver, à nous imaginer juristes à Westeros… et occultons le risque qu’une langue bien (trop) pendue nous mène droit à la potence de Port-Réal.
Armageddon (Michael Bay, 1998) et le Droit international de l’Espace – Une analyse de Jean-François Mayence
Un monstrueux astéroïde file droit sur la Terre et menace l’humanité tout entière. Harry (Bruce Willis) et son équipe sont recrutés et formés par la NASA pour aller à la rencontre de l’astéroïde et le faire exploser en y implantant plusieurs charges nucléaires.
On passera sur les invraisemblances scientifiques pleinement assumées, sur la couche dégoulinante de patriotisme bon marché et sur l’habituel grand cœur cynique et bourru incarné par Bruce Willis. Armageddon est un film d’action et de science-fiction, certes, mais il traduit à plus d’un égard un certain sentiment américain vis-à-vis de la communauté internationale, alors même que l’humanité fait face à son destin immédiat.
Quai d’Orsay (Bertrand Tavernier, 2013) : Le langage, régulateur des crises internationales – Une analyse de Immi Tallgren
Denrée rare et souvent fade du cinéma français, le film politique vient ces dernières années de gagner quelques lettres de noblesse ou, pour s’affranchir de toute terminologie aristocratique, quelques vaillantes couleurs républicaines. Après L’exercice de l’Etat, remarquable étude des cabinets ministériels signé par Pierre Schoeller, c’est au tour de Bertrand Tavernier de livrer, avec Quai d’Orsay, sa vision du fonctionnement du pouvoir exécutif. Il ne s’agit pas de sa première intrusion dans les hautes sphères de l’Etat. Il y a près de quarante ans, Que la fête commence mettait déjà en scène les plus éminentes figures de la monarchie française. Certains prendront plaisir à établir quelques parallèles saisissants entre la cour du duc d’Orléans et celle du ministre des affaires étrangères. D’autres s’amuseront tout autant à reconnaître, parmi les acteurs qui firent une brève apparition dans Que la fête commence, l’encore tout jeune Thierry Lhermitte, qui tient aujourd’hui le rôle du locataire phraseur et virevoltant du Quai d’Orsay.