Archives de catégorie : « Culture-pop » et droit international

Sont présentées ci-dessous les analyses du projet « Culture-pop » et droit international classées par ordre inversé de parution sur le site du centre.

Peut-on tirer sur n’importe qui ? par Martyna Fałkowska et Alexandre Faudon

Performance du 7 mars 2015 -  La soldate est incarnée par Martyna Fałkowska et le professeur par Alexandre Faudon

Performance du 7 mars 2015 – La soldate est incarnée par Martyna Fałkowska et le professeur par Alexandre Faudon

Une scène avec un écran en fond contenant la question, en grands caractères : « peut-on tirer sur n’importe qui ? ». Pendant qu’une musique martiale retentit (Ennio Morricone : The Battle of Algiers : https://www.youtube.com/watch?v=m3-o5LJ_Gow ), une femme en uniforme militaire et un homme en pantalon et veste (non assortis) de velours côtelé, chemise et cravatte mais le tout dans une allure quelque peu négliglée, entrent en scène. Elle marche en rythme régulier, de manière saccadée. Lui adopte en revanche une démarche souple et décontractée. Elle se place à gauche de la scène, debout, jambes légèrement écartées, le regard droit et fixe, les bras derrière le dos avec les deux mains qui s’y joignent. Il se place sur une chaise située de l’autre côté, et feuillette nonchalemment un code de droit humanitaire tout en portant, de temps à autre, une pipe à ses lèvres.
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S.A.S. L’agenda Kosovo : de Villiers, « légaliste désenchanté » ? – Une analyse d’Agatha Verdebout

word-imageL’intrigue de ce numéro 171 de la série SAS se déroule à veille de la déclaration d’indépendance du Kosovo, à l’automne-hiver 2007-2008. Par une froide nuit d’automne, les moines du monastère serbe orthodoxe de Vesaki Decani (entre Pec et Prizren) sont sauvagement décapités alors que les bersagliers italiens de la KFOR supposés les protéger vaquaient à des occupations plus … plaisantes. Cette exaction est-elle le fait d’un groupuscule d’extrémistes kosovars ? Ou  résulte-telle plutôt d’un complot de Belgrade, bien décidée à enrailler la marche latente mais certaine de la province vers l’indépendance? Notre héros, Malko, est appelé sur place par le bureau de la CIA à Pristina afin de résoudre cette énigme. Dans sa mission, il sera accompagné par Karin Steyr, une fonctionnaire de l’OSCE, qui s’avérera plus tard être un agent du MI6 ; après tout « c’est vrai que, d’habitude, les employés de l’OSCE ne parlaient pas albanais… » (p. 183).

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Les résolutions des Nations Unies concernant la guerre du Liban en musique ? « War Crimes (The Crime Remains the Same) », The Special AKA – Une analyse de François Dubuisson

Photo 1D’abord dénommé The Special AKA, The Specials est formé à Coventry en 1977 autour de Jerry Dammers, le compositeur principal, et Terry Hall, son chanteur à la voix nasillarde. Le groupe allie l’énergie du punk-rock aux couleurs de la musique jamaïcaine, puisant largement dans les rythmes syncopés du ska, style apparu à Kingston dans les années 1960. Continuer la lecture

Inglorious Basterds (Quentin Tarantino, 2009) : De l’inapplicabilité du droit des conflits armés ratione cinemae – Une analyse de Michel Erpelding

ibMenée contre un régime radicalement opposé aux notions d’humanité et d’égalité souveraine des États, la Seconde Guerre mondiale incarne, dans l’imaginaire collectif européen, l’idée même d’une guerre juste, au point que même l’Allemagne considère aujourd’hui le 8 mai 1945 comme un « jour de libération », selon l’expression de l’ancien Président fédéral Richard von Weizsäcker, récemment disparu. Le concept de guerre juste est, on le sait, éminemment problématique : étroitement associé à l’idée de punition, il semble en profond décalage avec le droit de la guerre, dont les règles ont pour seul but de limiter les dégâts humains, matériels et environnementaux causés par les hostilités, indépendamment de la qualité morale des belligérants. Le récit uchronique livré par Quentin Tarantino dans son film Inglorious Basterds attaque cette problématique de front, à l’aide d’un grand couteau de chasse. Les juristes attachés au respect du jus in bello devraient-ils lui en tenir rigueur ? Continuer la lecture

Civilization V : le droit international peut-il être ludique ? Une analyse de Nabil Hajjami

unnamedNée au début des années 1990, la franchise Civilization a connu un réel succès critique et commercial. Fin 2014, elle s’était vendue à plus de 22 millions d’exemplaires, touchant ainsi un public de plus en plus large. Le dernier opus en date, Civilization V : Brave New World, est commercialisé depuis 2013.

Le principe de Civilization n’est rien de moins que d’offrir au joueur une possibilité ludique de réécrire l’histoire de l’humanité. Le jeu débute ainsi en – 4000 av. J.C. et place le joueur à la tête d’une modeste tribu, choisie parmi un large panel de civilisations ayant marqué l’Histoire mondiale (de Rome à Babylone, en passant par le Songhaï, la Corée ou les Amérindiens). Le joueur est ensuite chargé, sur une période de plus de 6000 ans, de présider à la destinée de sa civilisation. Au cours de la partie – laquelle peut au demeurant s’avérer très longue – il lui appartiendra de déterminer, librement, les orientations scientifiques, religieuses, économiques, culturelles, militaires ou encore diplomatiques de sa civilisation. Continuer la lecture

S.A.S. La résolution 687 : à la rencontre du droit international… Une analyse de Laurent Weyers

sas 687Ce 121ème numéro de la série SAS paraît, vu son titre, spécialement accrocheur. Il l’est à tout le moins pour celui qui, affectionnant tout autant le droit international que les romans d’espionnage, se plaît à examiner comment l’on présente le premier quand on écrit les seconds. L’intrigue se construit sans surprise dans le contexte qui suit l’adoption par le Conseil de sécurité, le 3 avril 1991, de la résolution 687. Quelques années ont passé, l’embargo fait durement souffrir l’Irak, et plus encore les hommes, femmes et enfants qui y vivent. Une lueur d’espoir perce toutefois quand Hussein Kemal, le gendre de Saddam Hussein, fuit l’Irak et se réfugie en Jordanie. Hussein Kemal, qui est en même temps le superviseur des programmes d’armement irakiens, semble en effet tout prêt à collaborer avec l’UNSCOM, la commission chargée en vertu de la résolution 687 de contrôler le démantèlement de l’arsenal irakien. Or, les secrets livrés, l’embargo ne se justifierait plus et il pourrait donc être levé. Seulement voilà, Chirstopher Angleton, le chef de la station de la CIA à Amman, n’y croit pas. Selon lui, la défection d’Hussein Kemal – et la découverte des documents relatifs aux armes secrètes irakiennes qui s’en est suivie – serait seulement une mise en scène. Voici comment il explique la situation au Prince Malko Linge, le célèbre héro de la série SAS, qui vient d’atterrir à Amman et ne connaît donc pas encore tous les contours de sa nouvelle mission. Continuer la lecture

Clash à l’Institut de droit international : Washington Bullets et le principe de non-intervention – Une analyse d’Olivier corten

Macintosh HD:Users:olivier:Desktop:527.jpgThe Clash, formation britannique qui a sorti cinq albums devenus cultes entre 1977 et 1982, restera sans doute dans l’histoire de la musique pop comme un groupe révolutionnaire. Bien sûr, le qualificatif se justifie d’abord par le fait qu’on se situe en présence de l’un des groupes-phare (sans doute le plus connu après les Sex Pistols et, de l’autre côté de l’Atlantique, les Ramones) du mouvement punk, qui a bouleversé les codes musicaux entre 1976 et 1977. Sont ainsi dénoncés les groupes « dinosaures » alors en vogue (Genesis, Pink Floyd, Deep Purple, Yes, …), qui proposent une pop-rock techniquement élaborée, avec de longs morceaux rehaussés par d’impressionnantes vocalises et ponctués par d’interminables solos de guitare sur fond de nappes de synthétiseurs. A l’époque, l’establishment rock prétend confiner au raffinement du jazz voire de la musique classique, mais a sans doute perdu une grande partie de son énergie fondatrice. Continuer la lecture

The Constant Gardener (Fernando Meireilles, 2005) – L’internationaliste : colombe, faucon ou … labrador ? Une analyse d’Agatha Verdebout

word-imageEn 2005, j’avais 17 ans et comme tout adolescente terminant ses études secondaires me revenait la lourde tâche de choisir « ma voie ». Cela faisait déjà un certain temps que le droit international trottait dans un coin de mon esprit et, avec la naïveté qui peut nous caractériser à cet âge, l’adaptation à l’écran de ce best-seller de John le Carré a probablement fait partie des nombreux éléments qui m’ont confortée dans mon idée. En revoyant ce film, près de dix ans plus tard, je pense mieux comprendre pourquoi : au fond, je n’ai fait que suivre le cheminement intellectuel que l’auteur (et le réalisateur) voulait que je suive.

The Constant Gardener nous raconte l’histoire de Justin Quayle, un diplomate britannique sans histoire issu d’une famille de diplomates britanniques sans histoires, en poste à Nairobi, Kenya. Sa femme, Tessa, juriste et activiste des droits humains qui menait une enquête sur les pratiques douteuses de certaines firmes pharmaceutiques, est retrouvée sauvagement assassinée sur les bords du lac Turkana, au nord du pays. Secoué par cette mort tragique ainsi que par les circonstances troublantes et les rumeurs d’adultère qui l’entoure, Justin décide de remonter le fil des événements; un parcours qui l’amènera à redécouvrir Tessa mais aussi à sortir de sa zone de confort. Car, foncièrement, ce thriller est le récit d’une émancipation où, pour reprendre l’allégorie de John le Carré, le héros sort de l’environnement claustral du jardin et ouvre les yeux, et surtout décide de prendre contrôle de son destin, dans la jungle qui entoure l’éden qu’il s’était créé.

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Le Jour où la terre s’arrêta (Robert Wise, 1951) : la souveraineté est-elle un concept intergalactique ? Une analyse de Barbara Delcourt

Ce film, devenu l’un des opus fondateurs de la science-fiction et qui a fait l’objet d’un remake sans grand intérêt sorti en 2008, porte bien la marque de son temps.  Il est en effet le produit des angoisses bien réelles liées à la course aux armements et, en particulier, au développement des armes atomiques par les deux superpuissances de l’époque. C’est d’ailleurs en raison de la course aux armements que des extra-terrestres vont débarquer à Washington. Leur porte-parole, nommé Klaatu, prendra l’apparence et l’identité (« M. Carpenter ») d’un être humain pour délivrer un message dépourvu de toute ambiguïté :

Jourterreim1l’usage de l’atome à des fins non pacifiques est lourd de menaces pour la survie de toute espèce dans la galaxie, et ne pourra dès lors être toléré, et ce alors même qu’un usage scientifique est au contraire valorisé puisqu’il a permis aux émissaires de ce message radical de couvrir des millions de kilomètres. C’est donc une question de sécurité collective au sens le plus large qui soit, puisqu’elle ne concerne pas uniquement les êtres vivant sur la planète terre.  Ainsi, et dans la mesure où toute décision néfaste prise par les Terriens peut avoir des conséquences fatales pour l’ensemble du système intergalactique, ces derniers ne peuvent simplement ignorer la mise en garde qui leur est faite. Continuer la lecture

South Park et la liberté d’expression: l’individu face au monde ? Une analyse d’Alexandra Hofer

South parkSouth Park est le nom d’une prairie située dans les montagnes rocheuses, dans le Colorado. Sa plus grande ville, Fairplay, a une population de 610 habitants. Rien de très excitant vu de l’extérieur. Sauf que South Park n’est pas qu’une prairie, South Park est également une comédie satirique créée par Matt Stone et Trey Parker. Cette série met en scène quatre garçons de 8 ans, Cartman, Kyle, Stan et Kenny (de gauche à droite dans l’image ci-contre), et raconte leurs aventures dans la ville de South Park. Si les épisodes ont connu un énorme succès, c’est non seulement grâce à l’humour noir de la série, mais également pour sa capacité à représenter des sujets d’actualité de façon, disons, … corrosive : « In the process of unapologetically ridiculing individuals and groups, the series pushes viewers to confront broader issues such as racism, war, mob mentality, consumerism, and religious fanaticism » (Peabody Award, 2005). Âmes rétives aux critiques s’abstenir.

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