Nous avons appris énormément de choses durant le concours et sa préparation. Dès notre sélection pour représenter l’ULB, ce qui fut déjà très gratifiant, jusqu’à la semaine du concours, nous avons travaillé d’arrache pieds afin d’être fin prêt la semaine du concours. N’ayant que trois semaines pour rédiger nos mémoires écrits, nous avons du affronter une première barrière, et pas des moindres : le stress. Notre temps de préparation était réglé comme du papier à musique, nous nous réunissions deux fois par semaine, parfois jusque tard dans la soirée, ainsi que durant des weekends longs et intensifs. Nous avons appris à nous montrer résilients et résistants au stress, qualités qui nous serviront sûrement dans notre vie professionnelle future. Une autre compétence que nous avons pu acquérir durant la préparation du concours est notre aptitude à nous exprimer oralement en public. En effet, une fois les mémoires rendus, l’heure a sonné de nous exercer aux plaidoiries. Nous avons dû travailler non seulement sur le fond, mais aussi sur la forme. Ainsi nous avons appris à nous adresser à la Cour (excelencies, honorable members, etc.), à bien formuler nos arguments et enfin à bien se tenir et à contrôler notre communication non verbale. Nous étions désormais prêts pour le concours.
L’édition 2019 du Manfred Lachs s’est tenue à l’Université de Paris-Sud, dans la banlieue parisienne. Le petit campus de la Faculté de droit a servi de théâtre à nos plaidoiries.
À notre arrivée le lundi après-midi, nous zieutons les équipes présentes pour le drink d’accueil, et apprenons que nous serons quelque 18 équipes à s’affronter. Celles aux aspirations ambitieuses se dégagent assez vite de la foule. Nous venons d’un peu partout : Slovénie, Autriche, Luxembourg, Grèce, Royaume-Uni, … L’Europe est bien représentée ! Nous recevons toutes les informations pratiques sur le campus, les joutes, et le déroulement des opérations pour la semaine. Nous sommes également présentés aux organisateurs, étudiants pour la plupart de l’Université de Paris-Sud, qui seront là tout le long de la semaine pour nous aider et nous guider.
L’équipe de l’ULB au complet, nous rentrons vers notre logement situé en plein Paris. RER, métro 3, métro 4… les transports en commun de Paris n’ont plus de secret pour nous. Motivés à donner le meilleur de nous-mêmes le lendemain matin pour notre première plaidoirie, nous nous attelons à la tâche et rédigeons nos arguments et contre-arguments. Fatigués mais anxieux, nous acceptons qu’il nous faut nous reposer, et nous filons dormir, chacun de son côté pour éviter les ronflements de certains.
8 heures le lendemain, nous nous réveillons et entamons doucement mais sûrement le dur périple vers le campus. Nous arrivons bien à l’avance, découvrons notre lieu de plaidoirie, et sentons le stress monter. 11 heures, il est temps d’affronter nos premiers concurrents. Nous sommes deux à plaider pour l’Etat demandeur, face à deux étudiantes françaises pour l’Etat défendeur. Devant nous, trois juges, dont l’organisateur du concours. Tout-va-bien. Notre pupitre n’en est pas un, il s’agit plutôt d’une table de cocktail aménagée pour l’occasion. Pour ajouter à la tension, nous sommes filmés par une équipe de télévision tournant un reportage sur le droit de l’espace (si vous voyez les « Cowboys de l’Espace » à la télé, c’est nous !). Le premier d’entre nous parle pendant 15 minutes, la seconde pendant 12 minutes, et nous nous réservons 3 minutes pour le rebuttal. L’équipe adverse en fait de même.
Au final, cette heure de plaidoirie passe vite, et pourtant quelle intensité ! L’exaltation ressentie connaît peu de pareil… la crainte ressentie lorsque les juges nous coupent pour poser une question n’est rien à côté de la satisfaction de réaliser qu’on peut, qu’on sait, leur répondre. Notre préparation et tout notre travail ont payé. Le feedback des juges à la fin est plus que positif, et extrêmement valorisant ; ils nous ont trouvé impressionnants, posés, et ont trouvé nos arguments originaux et bien présentés. Quel soulagement ! Quelle fierté ! Plus qu’à passer à la suite !
Retour au bercail, il est temps de se plonger dans la préparation des plaidoiries 2 et 3, qui auront lieu le lendemain à 9h et 14h respectivement. C’est un exercice long, éprouvant, mais ô combien enrichissant ! 23h, on imprime les nouvelles plaidoiries et on s’en va passer une courte nuit de sommeil. Après un réveil compliqué, on est de retour dans le métro 4, métro 3, RER… Première plaidoirie de la journée contre l’équipe slovène, future gagnante du concours européen. Une fois de plus la joute verbale se passe sans soucis, le retour des juges est assez positif. 14h, deuxième plaidoirie de la journée, cette fois-ci contre l’équipe suisse. Après cette longue journée éprouvante, il est temps de rentrer à l’appartement, non pas pour se reposer, mais pour préparer la quatrième plaidoirie, qui aura lieu une fois de plus le lendemain à 9h du matin. On travaille toute la soirée, à 23h on imprime les nouveaux textes, cinq minutes plus tard on est au lit. Jeudi, 6h du matin, on est debout, métro 4, métro 3, RER… Il est enfin temps d’affronter l’équipe russe. 10h, après des débats intenses sur l’abandon d’objets spatiaux et la notion d’objet spatial, c’est la délivrance ! Le premier tour des plaidoiries se termine. Il ne reste plus qu’à attendre le verdict à 16h et connaître les demi-finalistes. A notre plus grande déception, nous n’en ferons pas partie. Le bon côté des choses c’est qu’on pourra se reposer ce soir ! Il faut en effet être en forme pour le souper prévu par l’organisation le vendredi soir, une fois la finale terminée. Ce sera l’équipe slovène qui aura l’honneur de représenter l’Europe au concours mondial cette année.
Nous sortons très enrichis de cette expérience. Surtout, nous avons pu approfondir nos connaissances de droit international, ce qui est incontestablement l’un des grands bénéfices retiré de notre participation au concours. Si l’on étudie déjà le droit international dans le cadre de notre Master de spécialisation, la participation au concours permet d’approfondir notre connaissance du droit international. C’est, par exemple, grâce à notre participation au Manfred Lachs que nous sommes devenus intraitables sur l’article 60 de la Convention de Vienne sur le droit des Traités, au point de pouvoir en débattre pendant des heures. Et il s’agit là d’un exemple parmi tant d’autres. Outre l’expérience humaine, c’est aussi, et surtout, du droit international que nous avons appris durant ce concours.
Maxime Collignon, Lope Gallego et Chloé Veuve